vendredi 22 février 2013

Leçon de défaite


En tout parent germe un désir inavoué : avoir un enfant passionné.
On a tous été un jour ou l'autre imprégné par ces témoignages sur les enfants passionnés "A 7 ans, il apprend le piano classique plusieurs heures par jour. A 9 ans il impressionne les musiciens professionnels" (Oscar Peterson) ou encore "A l'adolescence il tuait des animaux" (Dexter)
Si tous les parent rêvent d'un enfant passionné c'est parce que, dans le meilleur des cas, on n'aura pas à s'interroger sur son avenir et à connaître ce moment de flottement passager quand, après le bac, il hésitera entre "un DEUG de sociologie, ou peut-être de civilisations étrangères, ou je sais paaaas" et que, dans le pire des cas, il aura toujours une passion pour le consoler dans les moments difficiles.
Oui, moi aussi je rêve d'enfants passionnés et je pensais naïvement qu'il me suffisait d'ouvrir grand les écoutilles pour découvrir ce qui pourrait faire vibrer ma fille.


L'année dernière, ma fille est restée subjuguée devant les images des Jeux Olympiques et notamment la gym. Elle m'a supplié "Maman, c'est ça que je veux faire !" La gymnastique est pour moi une discipline étrangère mais je reconnais son niveau d'exigence, aussi bien dans la discipline que dans les exercices, et les bénéfices qu'on peut en tirer avec une meilleure connaissance de son corps. J'ai dit Banco et merci les écoutilles !
C'est ainsi que le 10 février j'ai accompagné ma fille à sa deuxième compétition de gym. Celui qui s'est déjà plaint de la longueur d'un dimanche après-midi mais qui n'a jamais accompagné un enfant à une compétition sportive le dimanche après-midi, ne sait pas vraiment ce que veulent dire les mots longueur d'un dimanche après-midi.
Assisse dans une tribune d'une salle de sports municipale sans lumière extérieure, j'en étais à maudire mes écoutilles et tous les enfants passionnés de la terre, sur au moins cinq générations. Il m'était pratiquement impossible d'admirer ma fille en train de reproduire ces mouvements entre tout le bordel des agrès et la mise en lumière des plus grands disposés à l'avant de la salle, genre les roulades de ma fille ne sont pas assez spectaculaires.
Quatre heures plus tard (oui, vous avez bien lu), elle fut enfin appelée à se présenter pour la remise des prix avec son équipe. S'en suit une longue, très longue, liste de noms et d'équipes récompensés selon leur catégorie. D'ailleurs, à ce sujet, si vous souhaitez que votre fils  gagne un peu en estime de soi, je vous conseille la gym car il sera souvent seul dans sa catégorie ce qui laisse sous-entendre une médaille à tous les coups. Malheureusement ma fille est de sexe féminin et doit donc se mesurer à d'autres petites filles de sexe féminin qui doivent penser gym, boire gym, manger gym et même respirer gym. Quand j'ai vu que certaines équipes étaient habillées avec des survêtements floqués au nom de leur équipe dans le dos, j'ai bien compris que la bataille serait sanglante.
Hasard ? Coïncidence ? Bâtards de juges ? Pratiquement toutes les équipes de ce funeste dimanche furent récompensées, exceptée celle dont ma fille faisait partie. Evidemment mon petit coeur de maman avait à ce moment-là des envies de meurtre (toujours se méfier des petits coeurs de maman). Elle a tout de même eu le droit à un lot de consolation sponsorisé par le Mac Do du coin (oui, vous avez bien lu). 
C'est donc dans un silence plombé que nous revînmes de cette épreuve. Je craignais les sanglots et l'envie d'abandonner. J'eus le droit à la colère et l'envie d'en découdre.
C'est à ce moment-là que je compris que ma fille ne serait jamais une grande gymnaste et cela me chagrine un peu pour toutes les raisons évoquées plus haut. Mais finalement le non-renoncement dont elle fait preuve après une telle défaite devant un public m'a rendu encore plus fier d'elle, moi qui ai abandonné tellement d'activités quand j'étais jeune.
Et si sa passion c'était l'obstination ?


16 commentaires:

  1. Aïe ! effectivement la gym (que je ne connais pas et ne souhaite pas connaître !) semble être une discipline hyper exigeante...
    et l'obstination, sûrement une très belle qualité à développer, pour s'en sortir dans la vie !
    Un dimanche foutu, mais finalement instructif..!

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    1. @Stephie et les Cacahuètes
      Moi qui n'ai jamais été capable de faire une roue, c'est vraiment un monde nouveau et étrange dans lequel ma fille m'entraîne.
      Et effectivement ce fut très instructif car ma fille est plutôt du genre mauvaise joueuse, c'est bien une des premières fois qu'elle n'abandonne pas devant l'échec.

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  2. J'ai connu ça avec le patin à glace... ça durait des heures et en plus il faisait froooooiiii!d

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    1. @Mamina
      Ah punaise, le patin à glace, si en plus on doit trembler pour son enfante et le froid !: Et elle (il) a persévéré ?

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  3. arf.. la gym, je pourrai t'en parler des heures tellement j'ai passé de temps sur des barres, des poutres et des praticables jusqu'à mes 16 ans (on note que j'ai tout arrêter pour me faire pousser les fesses les 16 années qui suivirent).
    C'est un sport exigeant mais c'est un beau sport où on apprend beaucoup sur soi.
    Les échecs sont vécus à plusieurs, les victoires sont reconnues à leur juste valeur. En fait, le seul truc que je n'ai jamais aimé dans ce sport c'est cet esprit de compétition où l'amusement n'avait plus sa place.

    Si ta fille arrive à se relever d'une telle défaite, je pense que t'es bonne pour pas mal d'apres midi sur des gradins encore... Et ca me fait plaisir qu'elle s'accroche. c'est chouette la gym. Même quand on n'est pas très bon, si on s'amuse (et qu'on veut mettre sa raclée aux joggings floqués), c'est bien là le principal, malgré ce qu'en dise les entraineurs :)

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    1. @Cranemou
      Tu m'avais caché ce passé comaneciesque :)
      On a reçu le classement de la compét', elle est arrivée avant-avant dernière sur 60 participantes. Je crois que je peux faire une croix sur les JO :D
      Mais ça me fait plaisir de la voir enthousiaste (ce matin justement elle a regardé des vidéos de Nadia Comaneci) et volontaire. De toute façon si elle réussit à bien faire la roue, elle aura déjà battu sa mère dans cette discipline :)

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  4. J'ai fait de la gym de très longue année à assez haut niveau, c'est une discipline effectivement très exigeante qui ne supporte pas la médiocrité :) Ça demande un travail de longue haleine, c'est normal que ta fille ne soit pas au top dès le début, certains corps sont plus souples et s'adaptent plus vite que d'autres... Ça ne veut pas dire 1/ qu'elle n'est pas faite pour ce sport 2/ qu'elle ne progressera pas, seul le temps pourra faire son chemin. Et puis la compétition n'est pas obligatoire, elle ne peut pas tout simplement être en section "gym loisirs" ?

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    1. @Anouchka
      Pour moi le principal c'est qu'elle prenne du plaisir et effectivement qu'elle progresse ce dont je ne doute pas. Pour les compétitions, elle demande à les faire et il a fallu que je lui achète du coup le justaucorps du club (60 €, gloups !), ayant fait l'achat je t'avoue que ça me fouterait les boules qu'elle ne fasse pas les compets mais si vraiment je vois qu'elle n'y prend pas de plaisir j’arrêterais alors de l'emmener (et je retrouverais mes dimanches après-midi, youpi !)

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  5. 23 ans de gym derrière moi! des victoires et des défaites! Les victoires sont vécues comme si on était championnes olympiques! Les qualifications pour les championnats de france, les échecs tout ça fait partie de ce sport. Les après midi à attendre son palmarès, je connais! Mais si aujourd'hui il y a bien quelque chose qui me manque c'est les compet. La préparation les deux semaines avant, l'ambiance sur les plateaux de compet! J'adore! C'est surement pour ça que je continue à juger!

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    1. @LéaM
      Tu viens de conforter mon chapitre sur la passion : j'aimerais bien moi aussi avoir un truc qui me donne autant de plaisir ! :)

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  6. J'ai fait de la gym gamine... 1 an. Parce que mes parents n'avaient aucune envie de se farcir les compétitions du dimanche après-midi, et encore moins envie de m'emmener au gymnase deux fois par semaine (demandé par les entraîneurs "au vu de mon potentiel")... Il s'est passé la même chose avec le patinage artistique (2 ans) quand les entraîneurs ont expliqué à mes parents que les cours de mon niveau seraient dorénavant le matin avant l'école, à 7h30...
    Ce sont les deux seuls sports que j'ai vraiment aimé pratiquer...
    Au final, je n'en veux pas à mes parents. Quand je dois me taper 3 heures de gala de danse pour apercevoir ma Coquillette 5 minutes, au fond de la scène, au milieu de 15 autres nenettes en tutu, je la remercie intérieurement de ne pas avoir choisi d'activité qui nécessite plus d'un spectacle annuel !!!
    Félicitations à toi pour cette abnégation ;-) !

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    1. @Marie mon-nid
      Mais on avait les mêmes parents ! :D
      En fait je suis prête à m'investir parce que je trouve qu'une passion, sportive ou artistique ou autre, peut t'accompagner toute la vie et te donner du plaisir. Après je me suis bien mise d'accord avec mon mari, ce sera chacun son tour !
      Donc la prochaine en avril, ce sera pour lui ;)

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  7. je suis fière de toi, grande femme à petit coeur de maman. Bravo. Voici une médaille en chocolat et un cybertiare pour ta princesse.

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    1. @Lutecewoman
      Voici deux cadeaux qui ne pourront que ravir mère et fille ! :)

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  8. Moi je crois qu'il ne lui manque qu'une chose : le flocage.
    Ton texte m'a rappelé un magnifique roman de Howard Buten, Monsieur Butterfly. Un épisode se passe dans un tournoi de ping pong qui, toutes proportions gardées, m'a rappelé ton expérience.

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    1. @La vie presque en rose
      C'est déjà une grande consolation que de savoir que d'autres sont passés par là !

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